Pan ! T'es mort !
Publié : 20 févr. 2007, 13:29
PAN ! T'ES MORT !
Je suis un grand amateur de jeux vidéos... Vous savez, le genre d'activité qui consiste à faire bouger des machins sur un écran (vidéo, justement) avec un truc plein de boutons qu'on appelle une manette de jeu (re-vidéo, re-justement) et qui vous muscle les pouces et les index autrement plus efficacement qu'un ban de musculation.
Grand amateur de jeux vidéos suis-je, disais-je. J'ai d'ailleurs les pouces et les index remarquablement et magnifiquement musclés. En fait, il n'y a même que cela de remarquablement et de magnifiquement musclé chez moi... Mais là n'est pas la question.
Si je puis me targuer d'un si grand amateurisme vidéoludique, c'est que je pratique la chose régulièrement depuis une bonne trentaine d'année (d'où la sus-dite admirable musculature digitale, CQFD), depuis les années 70 du siècle précédent, où l'appréhension d'un jeu se limitait aux mouvements basiques de quelques points entre quelques lignes, le tout en quelques couleurs seulement ; jusqu'à nos jours où la dernière mode, pour faire exécuter un mouvement superbement dessiné en millions de couleurs à un personnage tellement bien représenté sur nos écran haute définition dernier cri qu'on le jurerait réel, n'est plus d'appuyer trivialement sur un vulgaire bouton, mais d'effectuer le vrai geste, avec son vrai bras ou son vrai corps, la machine à jeu se chargeant de vérifier que vous avez accompli correctement la bonne chorégraphie...
J'ai donc vécu cette évolution foudroyante (ce qui laisse à penser que je risque de finir remarquablement et magnifiquement musclé de partout), génératrice d'un chiffre d'affaire supérieur à celui du cinéma, et qui est au service de la recherche de la meilleure qualité possible d'immersion du joueur dans une réalité virtuelle.
Cette quête de la fausse vérité est un véritable graal : au début, pour donner un coup de sabre mortel à un ennemi (c'est un exemple, il pourrait aussi bien s'agir de le fusiller avec une mitrailleuse, de lui ouvrir le crâne avec une massue, de l'étrangler avec une corde, de l'écraser avec une voiture, de le disperser avec une grenade ou de le volatiliser avec une bombe -on peut s'amuser de bien des façons- ), il suffisait de presser une touche, maintenant il faut faire le geste complet. Il ne manque plus que le sabre, mais ça ne devrait pas durer longtemps au rythme où le progrès technique avance... C'est vrai ça, pour se sentir à la guerre, qu'y a-t-il de mieux que de faire carrément la guerre ?
Et là, je touche du doigt (lequel est, je le répète, remarquablement et magnifiquement musclé) LE défaut du jeu vidéo, LE problème, L'objet de tous les reproches qui lui sont faits : la violence.
Songeons-y : le seul but du joueur (de jeu vidéo) est d'anéantir l'ennemi, et ceci sans prendre de gants. Aucune noblesse dans l'action, nous ne sommes pas ici sur un stade où brille la haute tenue spirituelle des sportifs et de leurs admirateurs, dans le jeu vidéo, ça défouraille à tout va, ça détripaille dans tous les sens, ça escagorniflaille dans les grandes longueurs, ça détonaille à kalachnikov que veux-tu, ça ensanguinolaille à pleins seaux, on brutalise, on massacre, on assassine, on explose, on trucide, les cadavres jonchent la moindre parcelle de sol jonchable, les rares sillons encore visibles sont abreuvés d'un sang impur dont l'écoeurante odeur alourdit l'air, comme l'était celui des rues de Paris pendant la Révolution.
Est-ce là un bel exemple pour la jeunesse dont les troupes forment le gros des bataillons d'amateurs de jeux vidéos ? Où sont les saines activités juvéniles d'antan, quand la main innocente de l'enfant tournait fébrilement les pages d'un beau livre de contes que nous lisaient affectueusement des grands pères et des grandes mères ? Leurs voix chevrotantes ouvraient alors l'imaginaire enfantin à toute la poésie de belles histoires : un petit chaperon rouge qui se retrouve au lit en compagnie d'une sexagénaire mère-grand, qui s'avère être un vieux loup possédant de grandes oreilles, de grands bras, de grandes mains, une grande bouche, entre autres grandes choses ; un petit poucet dont les parents emplis d'amour n'ont qu'un seul souci : perdre leur progéniture dans la forêt et l'abandonner aux mains d'un ogre qui, en bon père de famille, égorge ses filles pour les dévorer...
Tous ces merveilleux récits, au contraire de ces effrayants jeux vidéos, développaient la créativité de ces fragiles esprits que sont ceux des enfants. Les mômes s'inventaient des mondes irréels qu'ils peuplaient de jeux fabuleux. Ils devenaient le gendarme à la poursuite du voleur.
Et quand le joueur, en repliant les doigts (qu'il avait peut-être de remarquablement et magnifiquement musclés) donnait à sa main la forme d'un de ces bons vieux colts à cow-boys, on pouvait l'entendre d'une voix innocente :
" Pan ! T'es mort !"
Je suis un grand amateur de jeux vidéos... Vous savez, le genre d'activité qui consiste à faire bouger des machins sur un écran (vidéo, justement) avec un truc plein de boutons qu'on appelle une manette de jeu (re-vidéo, re-justement) et qui vous muscle les pouces et les index autrement plus efficacement qu'un ban de musculation.
Grand amateur de jeux vidéos suis-je, disais-je. J'ai d'ailleurs les pouces et les index remarquablement et magnifiquement musclés. En fait, il n'y a même que cela de remarquablement et de magnifiquement musclé chez moi... Mais là n'est pas la question.
Si je puis me targuer d'un si grand amateurisme vidéoludique, c'est que je pratique la chose régulièrement depuis une bonne trentaine d'année (d'où la sus-dite admirable musculature digitale, CQFD), depuis les années 70 du siècle précédent, où l'appréhension d'un jeu se limitait aux mouvements basiques de quelques points entre quelques lignes, le tout en quelques couleurs seulement ; jusqu'à nos jours où la dernière mode, pour faire exécuter un mouvement superbement dessiné en millions de couleurs à un personnage tellement bien représenté sur nos écran haute définition dernier cri qu'on le jurerait réel, n'est plus d'appuyer trivialement sur un vulgaire bouton, mais d'effectuer le vrai geste, avec son vrai bras ou son vrai corps, la machine à jeu se chargeant de vérifier que vous avez accompli correctement la bonne chorégraphie...
J'ai donc vécu cette évolution foudroyante (ce qui laisse à penser que je risque de finir remarquablement et magnifiquement musclé de partout), génératrice d'un chiffre d'affaire supérieur à celui du cinéma, et qui est au service de la recherche de la meilleure qualité possible d'immersion du joueur dans une réalité virtuelle.
Cette quête de la fausse vérité est un véritable graal : au début, pour donner un coup de sabre mortel à un ennemi (c'est un exemple, il pourrait aussi bien s'agir de le fusiller avec une mitrailleuse, de lui ouvrir le crâne avec une massue, de l'étrangler avec une corde, de l'écraser avec une voiture, de le disperser avec une grenade ou de le volatiliser avec une bombe -on peut s'amuser de bien des façons- ), il suffisait de presser une touche, maintenant il faut faire le geste complet. Il ne manque plus que le sabre, mais ça ne devrait pas durer longtemps au rythme où le progrès technique avance... C'est vrai ça, pour se sentir à la guerre, qu'y a-t-il de mieux que de faire carrément la guerre ?
Et là, je touche du doigt (lequel est, je le répète, remarquablement et magnifiquement musclé) LE défaut du jeu vidéo, LE problème, L'objet de tous les reproches qui lui sont faits : la violence.
Songeons-y : le seul but du joueur (de jeu vidéo) est d'anéantir l'ennemi, et ceci sans prendre de gants. Aucune noblesse dans l'action, nous ne sommes pas ici sur un stade où brille la haute tenue spirituelle des sportifs et de leurs admirateurs, dans le jeu vidéo, ça défouraille à tout va, ça détripaille dans tous les sens, ça escagorniflaille dans les grandes longueurs, ça détonaille à kalachnikov que veux-tu, ça ensanguinolaille à pleins seaux, on brutalise, on massacre, on assassine, on explose, on trucide, les cadavres jonchent la moindre parcelle de sol jonchable, les rares sillons encore visibles sont abreuvés d'un sang impur dont l'écoeurante odeur alourdit l'air, comme l'était celui des rues de Paris pendant la Révolution.
Est-ce là un bel exemple pour la jeunesse dont les troupes forment le gros des bataillons d'amateurs de jeux vidéos ? Où sont les saines activités juvéniles d'antan, quand la main innocente de l'enfant tournait fébrilement les pages d'un beau livre de contes que nous lisaient affectueusement des grands pères et des grandes mères ? Leurs voix chevrotantes ouvraient alors l'imaginaire enfantin à toute la poésie de belles histoires : un petit chaperon rouge qui se retrouve au lit en compagnie d'une sexagénaire mère-grand, qui s'avère être un vieux loup possédant de grandes oreilles, de grands bras, de grandes mains, une grande bouche, entre autres grandes choses ; un petit poucet dont les parents emplis d'amour n'ont qu'un seul souci : perdre leur progéniture dans la forêt et l'abandonner aux mains d'un ogre qui, en bon père de famille, égorge ses filles pour les dévorer...
Tous ces merveilleux récits, au contraire de ces effrayants jeux vidéos, développaient la créativité de ces fragiles esprits que sont ceux des enfants. Les mômes s'inventaient des mondes irréels qu'ils peuplaient de jeux fabuleux. Ils devenaient le gendarme à la poursuite du voleur.
Et quand le joueur, en repliant les doigts (qu'il avait peut-être de remarquablement et magnifiquement musclés) donnait à sa main la forme d'un de ces bons vieux colts à cow-boys, on pouvait l'entendre d'une voix innocente :
" Pan ! T'es mort !"